C’est un royaume de gravats, de décombres
Une ville fantôme où se traînent les ombres
Les hommes en armes ne voient même pas
Les femmes en larmes derrière leur burka
Il y a des enfants pieds nus dans le froid
Qui ont croisé la mort plus d’une fois
Autour d’une épave de char d’assaut
Ils font semblant de jouer aux héros
À Kaboul
Soudain, dans le ciel de Kaboul
Par-dessus la foule
Un cerf-volant
S’élève, avec toutes les couleurs
Des anciens bonheurs
Du temps d’avant
La foule lève les yeux au ciel
Il y a si longtemps qu’elle n’a rien vu de pareil
Est-ce un mirage?
A-t-on vraiment le droit de regarder
Ne vont-ils pas venir nous enchaîner
Comme au Moyen-Âge?
Timidement, une flûte, un tambourin
Se font entendre au bout d’un chemin
La foule hésite, se regarde les mains
Puis elle sourit, et elle se décide enfin
Même les soldats battent le tempo
Tout doucement puis en allegro
Il y a si longtemps qu’ils n’ont plus dansé
Il y a si longtemps qu’ils n’ont plus chanté
Alors les femmes ont montré leur visage
Elles étaient belles comme des madones sages
Elles ont souri, et elles m’ont salué
Moi, l’étranger qui ne faisait que passer
Par Kaboul
C’est pas grand-chose, mais Dieu que c’était beau
Cette pluie de roses qui tombait de si haut
En plein hiver, la lumière de l’été
De tout son or fêtait la liberté
À Kaboul
Tout ça, quand dans le ciel de Kaboul
Par-dessus la foule
Un cerf-volant
S’élève, avec toutes les couleurs
Des anciens bonheurs
Du temps d’avant
C’est un royaume où d’entre les décombres
Un peuple entier s’éveille et sort de l’ombre
Texte inédit, écrit à son retour d’Afghanistan en décembre 2001.C’est un cerf-volant aperçu dans le ciel de Kaboul qui lui a inspiré ce texte.Symbole d’espoir, de liberté aussi, puisque dans ce pays, à une certaine époque, mêmes les cerfs-volants étaient interdits.